Des légumes frais, sains (et bons), pour les habitants de tout un quartier, invités à s’investir dans une « ferme urbaine ». Du boulot, aussi, pour quatre d’entre eux, en contrat d’insertion. Et la volonté de prouver qu’il est possible de faire éclore, partout, de belles idées.
C’est une (discrète) première française : une « ferme urbaine », à Dutemple. Là où l’ANRU a modifié la cité, en profondeur, laissant une place des Glaneurs où la Ville craignait dépôts sauvages et squats. Les Cols verts du Valenciennois y ont vu une belle opportunité : 9 000 m2 de terrain. Pour leur défi : « Si on arrive à faire pousser quelque chose sur ce sol, on peut le faire partout en ville », pariait Pierre Fleuret, l’encadrant technique de ce qui est depuis devenu un chantier d’insertion. Ceux qui traversent cet espace, aujourd’hui, ne peuvent que lui donner raison. À un mois des premières récoltes, le bitume du vieux Dutemple a disparu et la vilaine réputation du quartier en a pris un coup : « On nous a dit que si on ne clôturait pas, on aurait des dégradations. Il n’en était pas question. On a eu raison : jusqu’à présent, pas une étiquette n’a été enlevée, pas une branche cassée. »
Du bio sans le label
Depuis fin mars, des fruits et légumes poussent tranquillement à deux pas de l’A23. Avec très peu d’eau et sans électricité. Sur le principe de l’agriculture biologique mais sans le label : « Zéro pesticide, insecticide et engrais », garantissent les mains vertes. Une serre de 96 m2, trois conteneurs, douze grands bacs de culture, quarante arbres fruitiers et trois composteurs en bois sont aujourd’hui ouverts à tout un quartier. Un poulailler, un récupérateur d’eau de pluie, des cultures en colonne et un espace détente, aussi, demain. Au total, d’ici à la fin de l’année, 45 000 € auront été investis.
Fin 2016, Les agri-urbains du Hainaut décrochaient un appel à projet de la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF). Ils le présentaient dans la foulée à des riverains à peu près certains que cela ne dépasserait pas l’effet d’annonce : faire pousser des légumes et des fruits là où n’importe quel maraîcher sensé ne miserait pas une graine. L’association a contourné l’obstacle – ce mélange de glaise et gravats, vestige du passé, sous leurs pieds – en surélevant les cultures. Quelques mois plus tard, lorsque les réunions se sont multipliées, lorsque les adultes et enfants ont planté le verger, lorsque les toiles de la serre se sont élevées, une quinzaine de riverains, convaincus, s’engageaient. Des ateliers de plantation avec les habitants, le centre social et les écoles, toucheront ceux qui en doutent encore. Et les derniers récalcitrants découvriront le vrai goût des fruits et légumes, bientôt, dans leur assiette (1).
« L’idée, c’est que les habitants s’en saisissent et que, dans six ou sept ans, ils le reprennent. On allume la mèche et quand le feu a bien pris, on transmet pour aller ailleurs. »
Pour l’instant chantier d’insertion – avec quatre emplois occupés par des habitants du quartier – demain ferme urbaine à part entière. Telle est la vocation première du projet participatif : « L’idée, c’est que les habitants s’en saisissent et que, dans six ou sept ans, ils le reprennent », résume Guillaume Colson. Pour que le directeur de la structure puisse essaimer le projet : « On allume la mèche et quand le feu a bien pris, on transmet pour aller ailleurs. » (1) Les récoltes seront vendues à un tarif « solidaire », promet l’association. La méthode de vente sera décidée avec les habitants.
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