Le glyphosate ? Encore pire que le chiendent pour s’en débarrasser. Stéphane Travert, le ministre de l’Agriculture, aura obtenu que les amendements visant l’interdiction de cet herbicide classé comme « cancérogène probable » par l’Organisation mondiale de la santé ne soient pas inscrits dans le texte de la loi agricole voté le 30 mai dernier en première lecture par l’Assemblée nationale.
Et ce, malgré une pétition portée par une quarantaine d’organisations qui rassemble à ce jour quelque 270 000 signatures. Le processus parlementaire n’est pas toutefois pas achevé et, en juin, c’est au tour des sénateurs d’être interpellés, avant leur session plénière, prévue du 26 au 28 juin.
Le 27 novembre dernier, à la suite de la décision européenne de prolonger l’autorisation du glyphosate durant cinq ans, Emmanuel Macron avait demandé à son gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que l’utilisation de ce produit soit interdite au plus tard dans trois ans. On voit donc ce qu’il en a été.
L’exécutif ne s’emploie pas seulement à empêcher le vote d’une interdiction visiblement souhaitée par une large majorité de Français. Il semble aussi avoir abandonné toute volonté d’appliquer le plan Ecophyto 2 adopté par le précédent gouvernement et visant à réduire l’usage des pesticides en agriculture, dont le glyphosate.
Le plan Ecoyphyto 2, approuvé en octobre 2015, fixe l’objectif d’une division par deux de la consommation de pesticides en 2025 par rapport à 2008. Il marque un recul par rapport à l’ambition du plan précédent, adopté à l’issue du Grenelle de l’environnement (2009), et qui avait inscrit l’année 2018 comme date butoir. En revanche, des instruments de mise en œuvre et de suivi avaient été mis en place. Sont-ils opérationnels ? La question se pose.
Progression continue des herbicides
La dernière note de suivi du plan Ecophyto a été publiée en janvier 2017 et elle porte sur l’année 2015. Elle a montré une progression continue de la consommation de substances actives d’herbicides (et principalement du glyphosate) par les agriculteurs entre 2009 et 2015 (exception faite de l’année 2012). Ce travail de suivi du plan Ecophyto est aujourd’hui à la peine. En juin 2018, le ministère de l’Agriculture n’a toujours pas publié de note de suivi pour l’année 2016. Il ne fournit aucune information sur les raisons de ce retard, sur l’état du suivi ou d’échéance de parution de ce document qui sert de boussole. « Nous n’avons pas encore de calendrier, nous reviendrons vers vous dès que nous aurons une date », se borne-t-on à répondre au ministère.
Outre le retard dans le suivi de l’usage des pesticides en agriculture, la France se distingue par la pauvreté de ses statistiques sur les impacts environnementaux et sanitaires de ces substances. Entre autres exemples, les données sur la concentration de pesticides dans les cours d’eau remontent à 2011, tandis que l’évolution de l’indice d’abondance des oiseaux communs n’est connue que jusqu’en 2009.
Alors que les alternatives au glyphosate existent et son crédibles, la pauvreté des indicateurs est un marqueur assez fiable des intentions de l’exécutif : s’il n’a pas l’intention d’interdire le glyphosate aux agriculteurs, il ne se donne pas non plus les moyens de réduire l’usage des pesticides. Il est vrai que la santé de l’agrobusiness passe avant celle des agriculteurs, des consommateurs et de la nature.
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