dimanche 19 juin 2016

Gaz de mine, gaz de couche : conflit dans le sous-sol minier du Nord - Pas-de-Calais

Le sous-sol et ses réserves en énergie n’en finissent plus d’attiser les convoitises et les méfiances. Aujourd’hui, les écologistes pointent du doigt la Française de l’énergie qui débarque en Bourse. Mais qu’en est-il réellement ?


Pourquoi l’entrée en Bourse de la Française de l’énergie inquiète-t-elle les écolos ?
Ce sont Dominique Plancke, pour les Verts, Christine Poilly et Pierre Rose, membres du collectif Houille-ouille-ouille-5962, qui tirent la sonnette d’alarme : la Française de l’énergie, un des leaders français dans l’évaluation et l’exploration des ressources gazières, entre en Bourse avec l’ambition de lever 70 M€.
Pour les écologistes, il est clair que cette société lorraine veut avoir les moyens d’exploiter le sous-sol du Nord et notamment le gaz de couche. Au passage, cela lui permettrait « d’absorber Gazonor (ex-filiale de Charbonnages de France) » qui détient les titres miniers qui permettent d’exploiter et d’explorer les gisements (même éventuels) de la région.

Où en sont les sites de la région ?
Actuellement, deux sites sont exploités et produisent du gaz de mine (qui, lui, ne pose pas de problèmes) : ceux de Lourches, dans le Valenciennois, et de Divion-Avion, dans l’ex-bassin minier. Par ailleurs, deux permis d’exploration (seulement) ont été accordés à Gazonor pour le gaz de mine et de couche, dans le Valenciennois, mais aussi pour la région dans son ensemble. Selon la préfecture, les ressources en gaz de couche « équivaudraient à douze années de consommation de gaz en Nord - Pas-de-Calais ». Tout en ajoutant : « Il s’agit d’estimations qui devront être vérifiées par des forages d’exploration et des tests de production. »
On imagine aisément l’attrait que représentent ces gisements. Alors que Dominique Plancke, pour les écolos, oppose une tout autre vision : « La page du charbon est tournée, on en voit encore les conséquences sur l’environnement. Il faut arrêter, pour des raisons financières, d’épuiser la moindre ressource du sous-sol. C’est vraiment de l’acharnement. »

Mais il est où, le problème ?
Le problème, si l’on peut dire, est la menace d’une éventuelle mise en place de la fracturation hydraulique pour l’instant interdite par une loi du 13 juillet 2011. Pour Dominique Plancke, il n’y aurait pas, pour l’exploitant, d’autre solution que la fracturation qui pourrait d’ailleurs un jour revenir dans le débat (certains élus, de droite comme de gauche, y pensent en tout cas). « Et même sans fracturation, il y aurait beaucoup de dégâts en exploitant le gaz de couche », souligne Christine Poilly.
Sans compter que pour Pierre Rose, ce serait aussi à terme la porte ouverte pour « l’exploitation du gaz de schiste », avec dans tous les cas des menaces sur les ressources en eau. Une vision que conteste la préfecture, soulignant – toujours en absence de fracturation hydraulique – « un impact a priori similaire à celui des autres types d’hydrocarbures conventionnels » sur l’environnement.


Divion-Avion et Lourches : pas de projets avant deux - trois ans
À propos des deux sites régionaux susceptibles de voir le gaz de couche exploité, Nicolas Ricquart, directeur de Gazonor, apporte la même réponse : « Nous n’avons pas de projets dans la région dans les deux - trois ans. » Reste à savoir comment tout cela évoluera en fonction des rapports avec la Française de l’Énergie.


Pour les écolos, le doute n’est pas permis, d’autant que des forages ont démarré en Lorraine pour exploiter justement le gaz de couche avec de maigres résultats, faute justement de pouvoir utiliser la fracturation hydraulique. « Rien qui soit économiquement exploitable », résume Dominique Plancke. Ce qui incite d’ailleurs le collectif Houille-ouille-ouille à appeler à une manifestation en Lorraine du 19 au 21 août pour « enterrer le gaz de couche et le gaz de schiste ».
Pour ce dernier, la France n’est jamais à un paradoxe près, car si le pays n’en produit pas, il en accueille avec l’arrivée annoncée à Dunkerque de gaz de schiste américain. Ségolène Royal, ministre de l’Environnement, a annoncé vouloir examiner la manière dont il serait possible, à terme, d’interdire l’importation de ce type de gaz.

Pour s’y retrouver
- Le gaz de mine, exploité depuis 1992 dans la région, est du gaz présent dans les anciennes galeries des mines. Il est exploité par simple captage.
- Le gaz de couche est encore piégé dans les veines de charbon vierges. Il n’est pas encore exploité dans la région. Certains pensent qu’il faut en passer par la fracturation hydraulique, d’autres pas.
- Le gaz de schiste est du gaz contenu dans une roche qui présente un aspect feuilleté. La technique d’exploitation passe forcément par la fracturation hydraulique (interdite à ce jour).

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