Si les concentrations en oxyde d’azote ont nettement diminué avec la chute du trafic routier, il n’y a pas eu d’amélioration visible sur le front des particules. L’épandage est montré du doigt.
Traitement dans un verger de pommiers à Pérenchies (Nord), le 31 mars. DENIS CHARLET / AFP
Depuis le début du confinement décrété en France le 17 mars pour freiner l’épidémie de Covid-19, pas moins de huit pics de pollution aux particules ont été signalés dans les Hauts-de-France par l’observatoire de la qualité de l’air régional ATMO. Le dernier pic de pollution aux particules date du 24 avril, après trois jours consécutifs d’une qualité d’air mauvaise.
Avec la réduction de l’important trafic routier et la baisse d’activité de nombreuses industries, les Nordistes espéraient profiter d’un air plus sain qu’habituellement, l’année 2019 ayant été particulièrement catastrophique avec 51 jours de pollution recensés par ATMO. Or, si en avril les concentrations d’oxyde d’azote (polluant atmosphérique principalement émis par le trafic routier et le chauffage résidentiel) ont diminué de 47 %, il n’y a pas eu d’amélioration visible sur le front des particules.
A qui la faute ? Selon ATMO, plusieurs phénomènes ont pu être à l’origine des quatre épisodes de pollution de mars et avril. « D’abord, les particules ont de multiples origines, comme l’activité industrielle, le chauffage au bois, les activités agricoles et le trafic, explique Céline Derosiaux, chargée de la communication ATMO Hauts-de-France. Et puis à cette période de l’année, les conditions printanières favorisent la formation de particules dites “secondaires” ». Celles-ci sont formées à partir d’ammoniac et d’oxydes d’azote. Or, l’épandage de fertilisants est une source majeure d’ammoniac. Première région agricole de France, avec 2,1 millions d’hectares de surface agricole utile et 27 400 exploitations agricoles, les Hauts-de-France voient chaque année une partie de ses sols être recouverts de fumiers, lisiers et autres engrais azotés minéraux entre le début du mois de mars et la fin avril.
Demande de réglementation des épandages
Le 25 avril, le groupe Europe Ecologie - Les Verts a donc demandé au préfet de limiter les épandages agricoles. « Du 16 au 18 avril, par exemple, beaucoup de personnes ont indiqué qu’elles sentaient les odeurs d’épandage en étant à Lille, dénonce Julie Nicolas, cosecrétaire du groupe EELV de Lille-Lomme-Hellemmes. Et ces jours-là, les nitrates d’ammonium étaient très présents dans l’air. » Les Verts ne veulent pas stigmatiser les agriculteurs précisant qu’avec la fermeture des déchèteries, les brûlages de déchets verts par les particuliers, pourtant interdits, ont aussi favorisé la présence de particules fines. « On ne demande pas aux agriculteurs de renoncer à tous les épandages mais au moins de les reporter ou de les diminuer », ajoute Julie Nicolas qui regrette l’absence de réponse de la préfecture. « A Lille, comme partout en France, il y a un refus des préfets de réglementer les épandages, mais si on découvre que les pics de pollution peuvent être corrélés avec les hospitalisations en cette période de Covid, c’est potentiellement une petite bombe », estime Julie Nicolas. Les écologistes soulignent le lien étroit entre la pollution de l’air par les particules et le développement, ainsi que l’aggravation de maladies respiratoires, notamment du Covid-19. Or, une ordonnance rendue le 20 avril par le Conseil d’Etat rappelle que l’administration doit faire preuve, dans le contexte actuel d’urgence sanitaire, d’une vigilance particulière en prenant des mesures pour limiter les pratiques agricoles polluantes.
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