Seules deux petites collectivités locales nordistes ont choisi de suivre la solution généralisée en Belgique. Une redevance annuelle remplace la taxe d’enlèvement habituelle. Elle permet de réduire de près de la moitié la quantité de déchets déposée sur le trottoir. Moins on dépose, moins on paye. Une aubaine pour mieux trier.
Philippe Brouteele à La Gorgue. La poubelle noire pour les ordures ménagères, la jaune pour les recyclables.
Photo THIERRY THOREL. - VDNPQR
Philippe Brouteele vit tranquille aux abords de la petite campagne flamande de La Gorgue. Ils sont deux dans la maison, son épouse et lui. Avant 2005, ils payaient 240 € par an avec la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, cette TEOM que paient toujours 84 % des Français. Mais le couple ne verse plus que 120 € par an depuis qu’une redevance est venue remplacer la taxe, Philippe et son épouse comme les 40 000 habitants de la communauté de communes de la Flandre-Lys (CCFL) entre Armentières et Béthune. Philippe Brouteele préside le syndicat mixte de collecte et de traitement des ordures ménagères de la CCFL. Et sait convaincre. « La TEOM est injuste, elle dépend des surfaces foncières que l’on possède, pas des usages de nos déchets. Par exemple, une femme veuve dans une grande maison aura peu de poubelles à vider, peu de déchets, mais elle paiera cher sa taxe parce que sa maison est grande » . Avec la redevance, chaque ménage choisit une taille de poubelle et moins on la videra, moins on paiera car ici, c’est l’usage qui compte. Le système a fait ses preuves en Belgique, comme en Suisse ou en Lorraine et dans l’Ouest de la France. Dans le Nord-Pas-de-Calais, le territoire de Flandre-Lys s’est engagé le premier sur ce chemin depuis 2005, suivi par le pays de Solesmes, près de Valenciennes. Soit un total de 55 000 habitants pratiquant la tarification incitative, 55 000 sur quatre millions d’habitants.
Un problème de comportement
Pourquoi personne ne bouge ? La redevance est soutenue par Citéo (ex Eco-emballages), l’éco-organisme qui collecte l’argent du tri pour le redistribuer dans la valorisation des déchets. La redevance est un bonus-malus de nos poubelles. L’adopter n’est visiblement pas un problème de coût, mais de comportement. « Le montant de la TEOM est indiqué sur l’avis d’imposition foncier et personne ou pas grand monde sait combien il paie pour le ramassage de ses ordures ménagères, explique Rémi Léonard, responsables des opérations pour Citéo à Lille. Avec la redevance, au contraire, tout devient transparent. Les gens reçoivent une nouvelle facture, ils ont donc parfois l’impression de payer quelque chose en plus ».
Inscrite dans la loi comme une trajectoire à prendre sans que cela soit obligatoire, la tarification incitative concerne 4 millions de Français à ce jour, le ministère de la transition écologique souhaiterait qu’ils soient 25 millions en 2025. C’est dans cinq ans. Nous sommes à quelques mois des élections municipales, rien ne bougera avant. Ensuite, il faudrait entre 4 et 5 ans pour la mettre en place, un processus long, trop long. Audits complets à réaliser, informations pour changer les habitudes, tests, volonté politique surtout. La redevance incitative permet de réduire d’au moins 40 % le volume d’ordures ménagères dans les poubelles parce que les gens font attention. « On ne connaît pas meilleur levier pour augmenter la performance du tri », observe Marie-Ange Da Costa, référente de Citéo au plan national. Dans un an, la Flandre Intérieure et ses 103 000 habitants rejoindront la Flandre-Lys, sa voisine exemplaire. Un pas de plus pour faire des économies.
L’exemple belge
En Belgique, chaque ménage doit acheter un sac poubelle de sa commune pour les ordures ménagères. Il est si cher qu’il s’agit de ne pas le sortir trop souvent pour être enlevé. Un autre sac (souvent bleu et moins cher) permet de sortir les recyclables. Chaque collectivité doit faire payer le « coût vérité », le coût réel net du service de gestion des ordures à l’habitant. Le taux de recyclage est d’environ 70 % et la tarification incitative a permis de passer de 160 kilos en moyenne par an et par habitant en 2008 à 103 kilos en 2019.
Espèces d’ordures moins chères
En Flandre-Lys, les comptes sont faits avec près de 15 ans de retour d’expérience. Près de 30 % d’ordures en moins dans les poubelles dès la première année de mise en palce de la redevance incitative et la fin de la taxe sur avis d’imposition foncière. Le tonnage est passé de 8 500 tonnes ramassées dans les bacs noirs en 2005 à 6 100 tonnes cette année (- 40 %). En parallèle, les volumes de tri de plastiques, de papier-carton et de conserve ont progressé d’environ 20 %. Le brûlage d’ordures ménagères pour en mettre moins dans les bacs est quasi inexistant (la police du maire veille). Tout comme les dépôts sauvages, autant mettre les ordures dans les fossés, pas plus nombreux qu’avant 2005. Côté finance, tout dépend de la taille de la poubelle noire. La plus petite coûte 65 € par foyer pour 40 litres, pour 37 € par an ç partir de la 13ème levée. Pour une poubelle de 340 litres, la plus grande, il faudra payer 65 € et 160 € par an. Pour la poubelle jaune des recyclables, la grille va de 18 € après 7 levées pour 40 litres à 79 € pour la 340 litres.
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