jeudi 20 octobre 2016

Bras de fer sur les conditions d’épandage des pesticides autour des habitations

Le secteur agricole s’oppose à un projet d’arrêté qui tient compte de la présence de riverains, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent, et fixe les distances par rapport aux points d’eau.


Plus le grand public en apprend au sujet de la dangerosité des pesticides pour la santé humaine et la biodiversité, plus il arrive que les relations de voisinage se tendent dans les campagnes françaises. Surtout lorsqu’un agriculteur pulvérise sur ses champs quelque produit phytosanitaire très près d’un jardin ou d’une maison.

Un arrêté interministériel actuellement en préparation s’apprête à donner aux riverains une existence légale, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent. Ce texte doit remettre à plat les conditions d’épandage de produits phytosanitaires : force du vent ; distances minimales par rapport à une habitation et à un cours d’eau ; délais minimaux à respecter avant que les travailleurs agricoles – les plus exposés aux effets des pesticides – puissent pénétrer à nouveau dans une parcelle ou une serre qui vient d’être traitée.

Mardi 18 octobre doit être rendu l’avis du Comité de rénovation des normes en agriculture – un nouvel organisme installé par le premier ministre à la demande des représentants du secteur, qui réunit ces derniers et l’Etat. C’est dans cette enceinte discrète que le débat s’est engagé. Les enjeux sont importants. Les ministères de l’écologie et de la santé suivent le dossier de près. Mais c’est la version du ministère de l’agriculture qui s’impose jusqu’à présent. Et, le moins que l’on puisse dire, c’est que la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) n’a pas l’intention de lâcher grand-chose au nom de la protection des populations.

« Taguer les routes »
Depuis 2011, la pulvérisation de pesticides aux abords des crèches, des maisons de retraite, des terrains de sport et des parcs publics doit obligatoirement respecter des distances minimales. Dans certains départements, des arrêtés préfectoraux renforcent ces précautions en interdisant par exemple de traiter des parcelles proches d’une école à l’heure de la récréation. Mais c’est la première fois qu’il est question de réglementer autour de toutes les habitations, et, pis encore aux yeux du syndicat agricole majoritaire, autour des jardins des particuliers.

Dès le 14 octobre, la FNSEA appelait ses adhérents dans un communiqué à se mobiliser contre « l’arrêté phyto », comme elle le qualifie, incitant « les paysans qui sont en plein marasme économique » à « aller taguer les routes [du] pays avec des messages forts ». Le syndicat estime que ces nouvelles dispositions imposant des zones non traitées larges de cinq à vingt mètres entre les cultures et les habitations priveraient les exploitants d’un « énorme potentiel » de production.

« Nous avons calculé que cela va rogner au minimum quatre millions d’hectares de terres agricoles, soit 7 milliards d’euros de chiffre d’affaires par an, affirme Eric Thirouin, le président de la commission environnement de la FNSEA. Multiplier les parapluies au nom du principe de précaution va créer des distorsions avec nos concurrents. La France peut-elle se payer ce luxe ? »

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